[EDITO] La France censure la publicité vélo VanMoof
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le mardi 30 juin 2020 12:45 -La crise du Covid-19 devait, selon certains, marquer la frontière entre le monde d'avant et le monde d'après. Ce devait être un marqueur générationnel, le moment où l'humanité avait pris conscience, avec cette pandémie, qu'il fallait tout changer, vivre peut-être autrement.
Le vélo était même devenu l'objet de déplacement à la mode... tout simplement. Jusqu'à cette décision de l'Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) envers le fabricant de vélos néerlandais VanMoof. Son spot publicitaire a été rejeté par cette autorité car il "créerait un climat d'anxiété".
Un spot qui a pourtant été diffusé sans aucun problème aux Pays-Bas et même en Allemagne, où le lobby de l'industrie automobile est très puissant.
Finalement, rien n'a changé. On s'en est aperçu avec les différents plans de soutien :
- 60 millions pour le vélo
- 8 milliards pour l'automobile
Et pourtant, je suis un fervent amoureux de l'automobile. Mais cet amour n'est plus, aujourd'hui, raisonnable, avec les profonds changements climatiques auxquels nous sommes confrontés et auxquels nous-mêmes et nos enfants / petits-enfants devront faire face dans les décennies à venir.
Des aides pour relancer les ventes automobiles, prioritairement sur les véhicules électriques, dont on ne sait aujourd'hui s'ils sont une véritable solution intéressante sur le plan écologique. Même pour le vélo, les aides sont prioritairement allouées aux acheteurs de vélos électriques (bien souvent à plus de 2000€), celui qui voudrait s'acheter un vélo sans assistance à 1000€ n'aura lui, droit à aucune aide.
Mais revenons-en à la publicité VanMoof. La voici, car si l'ARPP l'a interdite à la télévision, elle est librement diffusable sur Internet :
Dans ce spot réalisé pour promouvoir les Electrified S3 et X3, on peut voir la carrosserie d'une voiture refléter différentes images qui évoquent la pollution (cheminées d'usines), des voitures accidentées ou encore coincées dans les embouteillages. Ensuite, le véhicule "fond", comme s'il était victime du réchauffement climatique, pour se transformer en vélo, comme si le vélo était l'avenir de l'automobile. Apparaît ensuite le dernier VAE de la marque, avec le message "Time to ride the future" - "il est temps de chevaucher le futur" -, ce qui n'a pas plu à l'ARPP.
L'autorité a envoyé un courrier au fabricant de vélo :
Certains plans présents dans les reflets de la voiture apparaissent, à notre sens, disproportionnés et jettent un discrédit sur tout le secteur de l’automobile (...) : plan d’usines/cheminées et d’accident, tout en créant un climat anxiogène. Ils devront donc être modifiés.
Même en Allemagne, où l'industrie automobile représente plus de 400 milliards d'euros par an, cette publicité a été bien accueillie.
VanMoof refuse de répondre à la demande de l'ARPP de modifier certains plans, comme pour "édulcorer" sa vidéo. Si les décisions de l'ARPP ne sont qu'un avis consultatif, bien souvent, les diffuseurs ne tentent pas le diable à risquer de s'opposer à cet organisme. Il est donc fort possible que ce spot publicitaire ne voit jamais le jour en France puisque VanMoof ne le modifiera pas.
Alfa-Claude Djalo, chargé de communication de VanMoof :
Nous refusons de faire une version édulcorée qui répondrait aux recommandations de l'ARPP en faveur de l'industrie automobile française. Notre message est fort, mais il n'y a aucune controverse et la pollution automobile reflète une situation à laquelle doivent faire face beaucoup de citadins. Je peux comprendre que ça puisse déranger, mais ça reste une réalité.
Si l'ARPP juge que "quelques plans sont excessifs", en revanche, montrer dans une publicité un gros SUV circulant en ville sans aucun piéton ni aucune autre voiture, là, l'autorité n'y trouve rien à redire.
Les constructeurs automobiles peuvent donc largement enjoliver la réalité et même cacher l'impact environnemental de leurs véhicules - les faisant même parfois passer pour des solutions totalement écologiques - mais un constructeur de vélo, lui, ne peut jouer sur son côté plus écologique que la voiture pour promouvoir son vélo ! Un constructeur automobile peut donc, selon l'ARPP, mettre en situation des véhicules dans des rues désertes -comme si acheter ce modèle allait vous faire rouler librement et de façon fluide en ville - sans que cela ne pose aucun problème.
Pourtant, en Europe, 30 % des émissions de gaz à effet de serre viennent des transports et parmi cette tranche, la voiture représente plus de 60% ! Bien sûr, loin de moi l'idée d'opposer auto et vélo. Certains usages font que la voiture n'est pas remplaçable pas un vélo (longs trajets, dénivelé, transports de gros objets...). Mais bien des trajets urbains, effectués bien souvent avec seul un conducteur à bord d'une voiture de 1 tonne, pourraient être remplacés par la bicyclette.
Bien sûr, VanMoof, avec ces images, ne fait pas dans la demie-mesure. Mais jusqu'à présent, la demie-mesure n'a pas opéré de changements suffisants dans l'esprit collectif. Même une pandémie mondiale ne semble pas, au final, avoir changé grand chose. Et s'il était temps de passer à la vitesse supérieure ?
A noter que Greenpeace avait déjà vu récemment une campagne refusée de diffusion par plusieurs cinémas et dans le métro pour à peu près les mêmes raisons.
Bref, le monde d'après, ce sera pour plus tard... :-(
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