Au coeur de Paris-Roubaix avec le team Europcar
Par Courses Professionnelles - Cet article a été lu 2793 fois. Commentaires : 3 .
le vendredi 24 avril 2015 18:37 -Après avoir vécu une étape du Tour Méditerranéen dans une voiture Mavic en 2013, cette fois, c'est sans doute la course d'un jour la plus difficile que j'ai pu vivre de l'intérieur.
J'ai en effet pris place dans la voiture du Directeur Sportif d'Europcar Benoît Génauzeau sur cette édition 2015 de Paris-Roubaix.
A défaut de pouvoir inviter des gens à vivre ce moment avec moi, je vais tenter de vous le refaire vivre via cet article accompagné bien sûr de photos, mais aussi de quelques vidéos.
Préparatifs et mécanos
Comme je l'explique dans mon article dédié à l'Enfer du matériel sur Paris-Roubaix, cette course est aussi une véritable épreuve pour les mécaniciens, un tour de force.
Des journées à rallonge, de multiples bricolages, mais aussi une journée de course très intense avec les multiples crevaisons et pépins mécaniques inhérents à cette épreuve.
Plus que jamais, ces hommes de l'ombre ont un rôle capital dans la performance des coureurs.
Heureusement, les cuisiniers de Fleury Michon apportent à toute l'équipe leur savoir-faire. Des petits plats équilibrés et dosés pour faire face aux besoins des coureurs.
Du côté de chez Mavic
Chez Mavic aussi, tout le monde est sur le pied de guerre.
A course exceptionnelle, dispositif exceptionnel. On sent de la pression chez ces professionnels du dépannage neutre. Malgré toute leur expertise, cette course n'est pas comme les autres. La préparation des nombreuses roues de secours pour les voitures et motos est minutieuse.
Mais la bonne ambiance est quand même de mise à quelques minutes du départ, pour les motards qui seront, une fois n'est pas coutume, sur des motos trail. Car eux aussi vont devoir franchir tous les secteurs pavés.
La radio est aussi prête à affronter tous les éléments dans ce compartiment "Tupperware" fait maison.
C'est parti pour la course
Dimanche 12 avril 2015. Je vais enfin pouvoir vivre Paris-Roubaix autrement que devant ma télévision.
Même s'il a plu un peu la veille, le temps s'annonce sec et plutôt chaud. Certains regrettent que cette édition ne se passe pas sous la pluie pour le spectacle, mais de mon côté, j'ai de la compassion pour les coureurs, je préfère qu'ils roulent aussi au sec. L'Enfer du Nord est déjà suffisamment difficile pour ne pas en rajouter, surtout que des pavés mouillés impliquent bien souvent des chutes.
Il fait à peine 5°, mais le ciel se dégage rapidement et le soleil tape sur la ligne de départ de Compiègne.
Le temps pour moi d'aller jeter un oeil sur le matériel des différentes équipes.
Aujourd'hui, mon bureau ressemblera à ça. Une Toyota Prius, la nouvelle voiture qui équipe les directeurs sportifs du Team Europcar.
Je suis en compagnie de Benoît Génauzeau, directeur sportif au volant, et Thierry Pouget, un des osthéopathes de l'équipe.
La journée ne va pas consister à rester au sein de la course. Seule une voiture, celle de Dominique Arnould, est autorisée à le faire.
Pour nous et de nombreux autres véhicules de l'équipe, la journée va consister à être présent à la sortie de plusieurs secteurs pavés afin de ravitailler les coureurs, mais aussi d'avoir des roues de secours pour les dépanner au cas où.
10 minutes avant le départ des coureurs, nous prenons donc la direction du premier secteur pavé que Benoît a programmé, le numéro 26, via l'autoroute. Mais nous pouvons tout de même suivre la course via Radio Tour. La région est plutôt plate, cela permet d'écouter les infos course même à plusieurs kilomètres de distance.
A 12h20, nous arrivons sur le premier secteur, le numéro 26. Les coureurs arrivent dans 30mn, ce qui nous laisse le temps de faire un rapide pique-nique !
Il fait déjà 12°... certains locaux sont en t-shirt. Moi le toulousain, je supporte mon sweat et mon blouson. Ambiance bonne enfant sur le bord de la route avec grillades.
Les pavés m'impressionnent déjà, et pourtant, ce n'est rien par rapport à d'autres secteurs.
Nous sommes en place pour le dépannage des coureurs.
A droite, Benoît Génauzeau avec un t-shirt Europcar pour être parfaitement identifié de loin par les coureurs de l'équipe.
Au menu, 4 roues Campagnolo (Bora 50 et Hyperon pour les amateurs de matos). 2 roues avant et 2 roues arrière. Cela devrait suffire.
Toutes les équipes ont une logistique identique à celle d'Europcar sur Paris-Roubaix. On retrouve donc à la sortie de chaque secteur pavé les staffs des équipes avec roues et bidons.
Peu avant 13h, les coureurs déboulent sur le secteur pavé. C'est déjà impressionnant à la télé, mais en réel, c'est pire. Comme dirait mon fils, "c'est un truc de fou !". Le bruit des roues carbone battant le pavé fait presque oublier le public.
Dès les coureurs passés, il faut vite remonter dans la voiture pour aller sur le secteur suivant, en coupant via les routes ouvertes.
Distribution de bidons pour les coureurs. On le voit, toutes les équipes sont présentes au même endroit.
Sur la photo de droite, Fred Grappe, le bien connu directeur de la performance de l'équipe FDJ, qui se mue en distributeur de bidons.
Etonné d'ailleurs qu'il me reconnaisse. Même si on se voit de temps en temps, ça fait plaisir.
Lors du passage des coureurs, c'est un peu "la guerre" pour être vu par les coureurs, pouvoir leur faire passer des bidons sans être gêné par le staff d'une autre équipe.
La règle veut que l'on se place toujours sur la droite de la route.
Après le passage, course à pied pour rejoindre la voiture et départ en 4ième vitesse pour le secteur suivant.
Un oeil sur la route pour Benoît Génauzeau, et un autre sur la carte pour trouver la route la plus courte.
Pas facile d'être derrière le volant. plus de 6h de voiture dans des conditions plutôt stressantes. Mais on a affaire à des professionnels.
Mes excuses, mais je n'ai plus le nom de ce secteur pavé. C'est un secteur relativement facile avec de beaux pavés, mais c'est un faux plat descendant. Les coureurs devraient donc passer très très vite.
Sur la 3ième photo, un coureur ayant crevé de l'arrière. Le choc pour moi quand je l'entends passer. Sans doute l'une des images (ou plutôt un son) les plus impressionnantes de cette course. Une roue carbone, ça fait déjà pas mal de bruit. Mais quand en plus le boyau est crevé et que le coureur passe sur la droite (là où les pavés sont moins beaux) à 35km/h, on a mal pour le matériel !
Après les photos, une petite vidéo réalisée sur ce secteur. Désolé pour la goutte présente sur l'objectif.
Direction sur le secteur suivant en doublant quelques coureurs.
Progrès technologiques obligent, nous pouvons suivre la course (sur Eurosport) via une tablette et la 3G. Qui aurait cru cela possible il y a 10 ans ?
Eurosport, Radio Tour et les infos données aux coureurs par Dominique Arnoult via l'oreillette, nous sommes au courant de tout ce qui se passe dans la course.
Il fait beau et chaud, c'est agréable.
Remarquez le gel énergétique fixé autour du bidon avec un élastique. Je n'avais jamais pensé à ça. Une idée pour les parents qui ravitaillent leur progéniture en bord de route !
Secteur pavé d'Orchies
Voici sans doute le secteur pavé qui m'aura le plus impressionné. Difficile rendre compte via des photos ou même une vidéo. Mais ce secteur est littéralement défoncé. A tel point que je verrai même deux voitures crever dans ce secteur. Une voiture de la direction ASO, et une voiture de l'équipe FDJ, celle de Marc Madiot.
D'ailleurs, les voitures sont pour la plupart munies de protège-carters pour le Paris-Roubaix. Un dispositif que l'on a plus l'habitude de voir sur le Paris-Dakar que sur des voitures suivant des coureurs cyclistes.
Face à moi, Sir Dave Brailsford, Manager du Team Sky. Sympathique bonhomme, amoureux de cyclisme et détendu malgré l'enjeu. Sans doute le légendaire flegme britannique. Il me touchera quelques mots dans un excellent français, mais je n'ai pas osé lui demander une interview ou lui donner la carte de Matos Vélo.
Orchies, même en voiture, ça secoue. Et pourtant, la Prius est plutôt confortable !
Ensuite, direction l'avant dernier secteur pavé. Un Paris-Roubaix en sortie de secteur pavé avec les hélicoptères, les voitures suiveuses, le personnel des équipes pour le ravito, ça donne ça !
Carrefour de l'Arbre
Paris-Roubaix ne serait plus vraiment Paris-Roubaix sans le carrefour de l'Arbre, au même titre que la Tranchée d'Arenberg (que je n'ai pas pu voir malheureusement).
Le public ne s'y trompe pas et est venu en masse à cet endroit stratégique. Un écran géant a même été installé pour que les gens puissent suivre la course.
Un secteur souvent décisif. On dit que le coureur qui passe en tête devant le restaurant de l'Arbre a de bonnes chances de remporter la course. Ce ne fut pas le cas cette année, puisque Degenkolb n'est pas passé en tête.
Les coureurs heureux d'en terminer
A l'image du canadien Antoine Duchesne du Team Europcar, tous les coureurs sont heureux d'en terminer avec l'Enfer du Nord.
Terminer Paris-Roubaix, c'est déjà une victoire en soi.
Certes, ça n'a pas la même saveur que de lever les bras et soulever le fameux pavé remis au vainqueur de l'épreuve, mais même pour un pro, je pense qu'il y a une certaine satisfaction de pouvoir se dire "je l'ai fait".
De mon côté, une expérience inoubliable. Oui, je sais, je suis chanceux. Mais il n'y a pas que la chance qui fait que j'ai pu vivre cela. Beaucoup de travail aussi. Mais je reconnais que je suis privilégié et c'est aussi pour cela que je vous fais partager du mieux possible cette journée.
Vous trouverez en prime un peu plus de 200 photos de la course réalisées ce jou-là dans ma galerie du Paris-Roubaix 2015.
Un grand merci à toute l'équipe d'Europcar, aux petits soins avec tous les invités. Dominique Arnould, Jean-René Bernaudeau, Benoît Genauzeau, Blaise Chauvière, Rony Martias, Hubert Long, Thierry Pouget, Steven Laget, Mickaël Pichon, Vincent Poulain, Corinne Pasquier, Charlotte Debord et tous ceux que j'ai dû oublier.
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